La Chasse sauvage-Laetitia Bourgeois
En scrutant le ciel au dessus de la citadelle médiévale de Billom, je sentis soudainement quelques gouttes de pluie ruisseler le long de mon masque de cuir, encore engorgé de poussières. En ce dimanche 4 septembre 2011, armé de trois bombardes bretonnes, et d’une ancienne flûte irlandaise, tel un soldat errant, j’occupais mon temps libre à faire virevolter quelques notes de musique au milieu d’un bien étrange charivari…
Puis vint l’heure du célèbre concours de costume. Entre brume et soleil, après plusieurs passages éclair sur l’estrade principale de la place des écoles, on récompensa ma prestation scénique en me livrant en main propre un bien intriguant recueil intitulé « La chasse sauvage »…De retour au-delà des quartiers nord de Montferrand, à la nuit tombée, refugié dans ma sinistre demeure, mon esprit se mit à divaguer, ensorcelé par l’univers artistique si particulier dépeint par Laetitia Bourgeois …
Dés les premières pages du livre, cette description si singulière (froide et inquiétante) d’une horde de cavaliers masqués, semant la désolation et la terreur dans les villages de campagne du XVIème siècle, a très rapidement empoissonné mes pensées et songes nocturnes, m’emprisonnant alors jour après jour dans un leitmotiv sordide et oppressant, suscitant de multiples interrogations : qui sont ces barbares sans visages ? Apparitions diaboliques ou complot féodal ?pourquoi le blé est il volé puis redistribué à la porte des nécessiteux …et comment expliquer ce mystérieux silence, qui envahit progressivement les foyers du centre et du sud de la France.
Plongée en plein cœur du moyen âge, Barthelemy (bayle du village du Val d’Amblavés) accompagné par son épouse Ysabellis entraîne le lecteur dans une enquête fascinante, afin de comprendre et déjouer les pièges accompagnant la sinistre épopée de cavaliers errant. « La chasse sauvage » inspirée par les benandanti italiens (Carlo Ginzbourg) et certains personnages réels français (dont le saumadier Philibert Barbasto), est une bien belle réussite littéraire. En donnant vie à cette magnifique intrigue parfaitement bien ficelée, rappelant la logique infaillible des romans d’Agatha Christie, et l’ atmosphère brumeuse typique de la fantaisie médiévale , Laetitia Bourgeois ne pouvait que me faire chavirer dans les ténèbres, en aiguisant sa plus belle arme de séduction, la magie de l’écriture….
En cette veille de toussaint, époque de la fête des morts, je ne pouvais attendre l’aube pour rendre ainsi hommage à ce fabuleux roman, sorti en 2010 aux éditions privat.