Minable
MAHRK GOTIE
« Le christ a fait de nous des hommes libres »
(Christus Nos Liberavit)
Cet énoncé lapidaire (rappelant le récit des misérables immortalisé par Victor Hugo) pourrait à lui seul constituer le fil conducteur parfois morbide et enjoué qui symbolise le schéma de pensée universel caractérisant les personnages de l’œuvre de Mahrk Gotié, une œuvre que l’on pourrait presque qualifier de philosophique…
Tout commence par la description froide et chirurgicale d’une jeunesse égarée, qui lassée du quotidien s’initie progressivement aux problématiques existentielles : La mort qu’elle soit imminente ou lointaine devient alors un leitmotiv incurable, une fatalité triomphante et parfois indomptable qui guidera le lecteur à travers les yeux de ces adolescents bien décidés à transgresser toutes les règles de citoyenneté.
« Quand on refuse de devenir une utilité publique, il ne reste généralement plus qu’une seule alternative : être un criminel… » : Le ton profondément nihiliste est très vite identifié. A l’image de Certains romans de Fiodor Dostoïevski (Les démons 1871), Les personnages errant dans les pages de « minable » (Ivan et Betty, Tony , Joshua…) se transforment très vite en révolutionnaires sanguinaires, contaminés par des sensibilités changeantes , anormales et parfois presque inhumaines, ou au contraire peut être même trop humaines…
Lorsqu’on tourne les pages du roman de Mahk Gotié , on peut être amené à revivre les scénettes démoniaques d’Orange Mécanique (Anthony Burgess) P72, tout en respirant à plein poumons les envolées lyriques de poèmes délurées (« Les prémisses de l’amour ») . C’est ainsi que se savoure ce livre, dans la folie et l’allégresse. Ainsi, tout au long du récit, Mahrk Gotié déstabilise le lecteur, en mélangeant sans aucune retenue, mais avec un talent incontestable l’horreur et l’érotisme poussé à l’extrême. Une épopée interminable (rappelant l’imagerie développée par Ruggero Deodato dans « Cannibal holocaust » ou bien les croisades particulièrement sombres de Robert E.Howard « conan le barbare ») inaugurera d’ailleurs la troisième partie de l’histoire.
Le lecteur est alors embarqué dans un tourbillon nauséeux et idiosyncrasique, rempli d’émotions fortes et de réflexions métaphysiques. Dans ce déluge de noirceur, de vulgarité et d’apprentissage de la vie, Marhr Gotié semble alors vouloir nous confronter à notre propre miroir afin que l’on puisse tous se poser cette même et unique question : la vie mérite t’elle d’être vécu ? En ce qui me concerne, et conformément à la fin du récit caractérisé par un univers étrangement paradisiaque et enchanteur, ma réponse serait oui, sans aucune hésitation…